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DIVISION D’ANNULATION |
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ANNULATION Nº 19 396 C (NULLITÉ)
Biofarma, Société par actions simplifiée, 50 rue Carnot, 92284 Suresnes cedex, France (demanderesse), représentée par Cabinet Germain & Maureau, 31-33 Rue de la Baume, 75008 Paris, France (représentant professionnel)
c o n t r e
C.R. Bard, Inc., 730 Central Avenue, Murray Hill, New Jersey 07974, Etats Unis d’Amérique (titulaire de la marque de l’Union européenne), représentée par Frkelly, 27 Clyde Road Ballsbridge, Dublin 4, Irlande (représentant professionnel).
Le 28/05/2019, la division d’annulation rend la présente
DÉCISION
1. La demande en nullité est rejetée dans son intégralité.
2. La demanderesse supporte les frais, fixés à 450 EUR.
MOTIFS
La
demanderesse a déposé une demande en nullité contre tous les
produits de la marque de l’Union européenne nº
16 293 102 « COVERA »,
à
savoir contre les produits de la classe 10. La demande se fonde sur
la marque de l’Union européenne
n° 5 683 561
« COVERAM ». La demanderesse invoque l’article 60,
paragraphe 1, point a), du RMUE en combinaison avec
l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE.
RÉSUMÉ DES ARGUMENTS DES PARTIES
La demanderesse affirme que les produits et les signes en présence sont similaires et qu’il existe dès lors un risque de confusion entre les marques.
En réponse, la titulaire de la marque de l’Union européenne conteste toute similarité entre les produits et sollicite la fourniture de preuves d’usage par la demanderesse. La titulaire procède également à une renonciation partielle de la MUE attaquée.
La demanderesse fournit des preuves d’usage de la marque invoquée et maintient la demande en nullité de la MUE attaquée estimant que la limitation du libellé n’est pas suffisante pour empêcher tout risque de confusion entre les signes en présence.
PREUVE DE L’USAGE
La preuve de l’usage de la marque antérieure a été demandée par la titulaire de la marque de l’Union européenne. Cela étant, à ce stade, la division d’annulation ne juge pas opportun de procéder à une évaluation de la preuve de l’usage présentée (15/02/2005, T‑296/02, Lindenhof, EU:T:2005:49, § 41, 72). L’examen de la demande en nullité aura lieu comme si l’usage sérieux de la marque antérieure avait été prouvé pour l’ensemble des produits invoqués, ce qui est le meilleur angle sous lequel le cas de la demanderesse est recevable.
RISQUE DE CONFUSION – ARTICLE 60, PARAGRAPHE 1, POINT a), DU RMUE LU EN COMBINAISON AVEC L’ARTICLE 8, PARAGRAPHE 1, POINT b), DU RMUE
On entend par risque de confusion, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause, à condition de porter les marques en cause, proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. L’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de plusieurs facteurs interdépendants. Ces facteurs incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit et le public pertinent.
Les produits
Les facteurs pertinents concernant la comparaison des produits ou services incluent, en particulier, leur nature et leur destination, leurs canaux de distribution, leurs points de vente, leur producteurs, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire.
Les produits sur lesquels est fondée la demande sont:
Classe 5: Produits pharmaceutiques.
Les produits contestés sont, après une renonciation partielle effectuée par la titulaire de la marque de l’Union européenne contestée, les suivants:
Classe 10: Stents médicaux et systèmes de distribution de stents.
Les produits pharmaceutiques de la demanderesse sont des substances chimiques utilisées afin de traiter, prévenir ou soulager les symptômes de maladies ou de blessures.
Les stents (ou endoprothèses) sont des prothèses, à savoir des dispositifs médicaux implantés dans l’organisme pour suppléer un organe manquant ou pour restaurer une fonction compromise (information extraite de l’encyclopédie en ligne Larousse https://www.larousse.fr). Les endoprothèses désignent un type particulier de prothèses, internes à l’organisme, par opposition aux exo-prothèses. A cet égard, la titulaire de la MUE attaquée précise qu « une endoprothèse médicale est un petit tube de maille métallique auto-expansible qui est placé à l’intérieur d'une artère coronaire après angioplastie transluminale percutanée. Elle a pour but d’empêcher que l’artère se referme et permet ainsi la circulation normale du sang et de l’oxygène vers le cœur ». Les systèmes de distribution de stents désignent les dispositifs utilisés pour positionner la prothèse dans le corps du patient.
Contrairement à ce qu’invoque la demanderesse, ces produits, incluant leurs systèmes de distribution, sont différents des produits pharmaceutiques. En effet, le seul fait que ces produits relèvent du secteur médical, ou qu’ils puissent être utilisés dans les mêmes lieux (notamment les établissements hospitaliers) n’est pas suffisant pour établir une similarité (11/03/2016, R 1388/2015-2, IVORY / IVOR § 11).
En effet, ils présentent une nature et une fonction distincte (substance chimique ayant une vocation curative ou préventive / implants chirurgicaux destiner à suppléer un disfonctionnement de l’organisme ainsi que leurs systèmes de distribution). Ils diffèrent également par leurs méthodes d’utilisation (administration orale ou injection intra musculaire / installation chirurgicale).
En outre, ils sont fabriqués par des entreprises distinctes (laboratoires pharmaceutiques / entreprises spécialisées dans l’outillage chirurgical) et empruntent des canaux de distribution différents. Leurs publics pertinents peuvent coïncider dans la mesure où les préparations pharmaceutiques de même que les produits contestés peuvent s’adresser au public professionnel ayant des connaissances dans le domaine médical, et notamment les chirurgiens. Toutefois, cette coïncidence est insuffisance pour en déduire une similarité entre les produits compte tenu qu’ils diffèrent dans tous les autres aspects.
Les produits en cause ne sont pas davantage en compétition. En effet, s’ils peuvent être considérés, d’une manière très générale, comme étant tous destinés à améliorer l’état de santé du patient, ils n’ont pas vocation à agir de la même façon et ne peuvent pas être utilisés indifféremment. Les produits pharmaceutiques et les stents médicaux et systèmes de distribution de stents ne sont donc pas substituables, et, partant, pas concurrents (04/02/2013, T-504/11, Dignitude, EU:T:2013:57, § 42). A cet égard, la demanderesse invoque le fait que la similarité entre les produits serait renforcée en l’espèce « par le fait que les produits pour lesquels [la marque antérieure] est exploitée, sont des produits pharmaceutiques pour le traitement des maladies cardiovasculaires ». Toutefois, si les produits contestés peuvent également être utilisés dans le cadre du traitement des symptômes des maladies cardiovasculaires, à savoir pour empêcher qu’une artère se bouche et permettre la circulation du sang, cette circonstance n’est pas suffisante pour considérer que ces produits sont concurrents dès lors qu’ils ne sont pas substituables, les deux produits n’ayant pas les mêmes actions sur l’organisme, ils ne sont pas nécessairement proposés aux mêmes patients.
De même, si lors d’opérations chirurgicales des produits pharmaceutiques peuvent, à l’évidence, être utilisés pour préparer le corps du patient, ceci ne suffit pas pour considérer que ces produits seraient complémentaires. A cet égard, il doit être rappelé que des produits sont complémentaires s’il existe un lien étroit entre eux, en ce sens que l’un est indispensable (essentiel) ou important (significatif) pour l’usage de l’autre de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de l’offre de ces services incombe à la même entreprise (11/05/2011, T-74/10, Flaco, EU:T:2011:207, § 40; 21/11/2012, T-558/11, Artis, EU:T:2012:615, § 25; 04/02/2013, T-504/11, Dignitude, EU:T:2013:57, § 44). Or, comme indiqué ci-avant, les fabricants et circuits de distribution habituels des produits comparés sont différents; en conséquence, les consommateurs, même s’il s’agit de professionnels avec un degré d’attention élevé, ne seront pas amenés à penser qu’ils proviennent de la même entreprise ou d’entreprises économiquement liées.
La demanderesse invoque une décision antérieure de l’Office pour étayer ses arguments, à savoir la décision de la division d’opposition n° B 2 596 404 du 10/08/2016, AMEDIAL / Mediall. L’Office n’est toutefois pas lié par ses décisions antérieures dans la mesure où chaque cas doit être traité séparément et en tenant compte de ses particularités. Cette pratique a reçu l’aval de la Cour, selon laquelle la jurisprudence consolidée impose d’évaluer la légalité des décisions uniquement par référence au RMUE, et non à la pratique adoptée par l’EUIPO dans des décisions antérieures (30/06/2004, T 281/02, Mehr für Ihr Geld, EU:T:2004:198).
Bien que les décisions antérieures de l’Office ne soient pas contraignantes, leur raisonnement et leur résultat doivent tout de même être dûment examinés lorsqu’il s’agit de statuer sur une affaire spécifique.
En l’espèce, l’affaire antérieure mentionnée n’est pas pertinente pour la présente procédure dès lors qu’il s’agissait d’une comparaison entre des appareils médicaux et vétérinaires d’un côté et des produits pharmaceutiques et vétérinaires de l’autre, les premiers ayant été considérés comme étant une catégorie large de produits pouvant être utilisés dans le cadre du traitement de maladies, alors que dans la présente espèce les produits concernés sont limités aux seules stents médicales et leurs systèmes de pose. L’argumentation de la demanderesse doit donc être écartée.
Conclusion
Conformément à l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE, la similitude des produits ou services est une condition de l’existence d’un risque de confusion. Dans la mesure où les produits sont manifestement différents, l’une des conditions nécessaires de l’article 8, paragraphe 1, point b), du RMUE n’est pas remplie et il y a donc lieu de rejeter la demande.
FRAIS
En vertu de l’article 109, paragraphe 1, du RMUE, la partie perdante dans une procédure d’annulation supporte les taxes ainsi que les frais exposés par l’autre partie.
Étant donné que la demanderesse est la partie perdante, elle doit supporter les frais exposés par la titulaire de la MUE au cours de cette procédure.
En vertu de l’article 109, paragraphe 7, du RMUE et de l’article 18, paragraphe 1, point c), sous ii), du REMUE, les frais à payer à la titulaire de la MUE sont les frais de représentation, fixés sur la base du tarif maximal indiqué dans ces dispositions.
La division d’annulation
Frédérique SULPICE |
Julie, Marie-Charlotte HAMEL |
Catherine MEDINA |
Conformément à l’article 67 du RMUE, toute partie lésée par cette décision peut former un recours à son encontre. Conformément à l’article 68 du RMUE, le recours doit être formé par écrit auprès de l’Office dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la présente décision. Il doit être déposé dans la langue de procédure de la décision attaquée. En outre, un mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé par écrit dans un délai de quatre mois à compter de cette même date. Le recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours de 720 EUR.